Août 2008... Août 2012 : Quatre ans déjà que l'immense écrivain et probablement le plus grand poète en langue arabe du monde contemporain nous a quittés...
Né en Galilée puis exilé par l'inhumanité de l'Histoire, Mahmoud Darwich aura été, tout au long de sa vie, la conscience intellectuelle et artistique la plus éclairée, la plus magnifiquement créatrice, la plus généreuse et la plus universelle du peuple palestinien et, bien au-delà de son symbole et de ses terres abolies, de l'ensemble du monde arabe des opprimés et de tous les humanistes occidentaux éblouis par l'inspiration, la beauté et la pureté de son écriture.
Avec la chaleur de sa langue qui est aussi " la quête d'une patrie ", au phrasé unique, sonore, envoûtant, sensuel, coloré, il aura su comme nul autre nous conter la nostalgie de tous les exilés, de tous les dépossédés de leurs sols et de leurs racines... Palestiniens bien sûr, mais aussi Andalous, Gitans et Roms dont " l'Inde s'éloigne encore..."
" Une patrie, il me l'a dit, c'est savourer le café de sa mère
et c'est rentrer à la tombée du jour "...
" Je lui ai demandé : et la terre ?
Il a dit : je ne la connais pas..."
( 1967 - Le soldat qui rêvait de lys blancs )
Mais, au-delà des engagements pour sa " patrie " et de la nostalgie de l'errance et de l'exil, la poésie de Mahmoud Darwich est aussi celle, sublimée, de l'amour de la vie et de la nature, des sentiments, de la sensualité et de la beauté...
" Le soir nous atteignit...
Le soleil
Peignait sa chevelure dans la mer
Et le dernier baiser accostait
A mes yeux, braises... "
( 1966 - Poèmes sur un amour ancien )
Finalement... exil quand même dans le corps de l'autre quand il parle de " ... L'exil de la femme dans l'homme et de l'homme dans la femme..."
Aujourd'hui donc, mon très modeste hommage à Mahmoud Darwich ne saurait parler, avec mes propres mots bien sûr, que de " sa " Palestine éternelle... :
Zaytûn
Tes oliviers
Se nouent aux vignes pour survivre
Cherchant la source éparpillée
Par la chevauchée des collines...
Palestine,
Ton jasmin monte courageux
Aux murs de hontes inavouées
Les femmes cueillent avec la fleur
La laine prise aux barbelés...
Palestine,
Tes oliviers
Longent la faille
Des vieilles terres écartelées
Le luth expire au sable aride
Des rives mères espérées...
Et ton nom tinte Palestine
Comme une très ancienne monnaie
Et ton nom luit au grand cyprès
Comme une lune réveillée...
Palestine,
Les oliviers ont la mémoire de ton peuple
De ses amours déracinées
Et de son sol qu'on a nié
Au versant ocre de la pierre
Au cours craintif de ses vallées
Quand ils se risquent à la frontière
A chuchoter la liberté...
Francis PONT
Août 2012